✩ good to know youUn silence. Rien que les bruits de pas dans la neige. Un soupir. Je ne voulais pas y aller. Pourquoi j'étais obligée de me farcir son récital, alors que personne ne veut aller voir mon match. Pourquoi on m'avait forcé à mettre cette horrible robe. Pourquoi ma mère m'avait fait ces horribles tresses. Ah je détestais tout ça. Mes parents avaient poussé la porte de la salle, n'arrêtant pas de me dire de rester près d'eux, de faire attention à où je mettais les pieds et surtout de ne pas faire de bruit. Oh c'était le seul moment de la soirée où mes parents s'étaient occupsé de moi. Le reste de la soirée, ils ne faisaient attention à la parfaite et magnifique Cordélia. Le petit génie de la famille. Celle à qui ont prédit un avenir radieux. Alors que pour moi, si je me retrouvais à travailler dans un mcdo ça serait un miracle. Je n'ai jamais compris pourquoi on croyait en elle, alors que ce fut tout le contraire que moi. Oui, Cordélia est plus jolie que moi. Oui, elle est sans doute plus intelligente que moi, plus studieuse. Plus ... Tout. Mais ce n'est pas pour ça qu'elle aura plus de chance que moi. Mais mes parents s'en fichaient. Cordélia était leur parfaite petite fille. Moi, j'étais leur erreur. J'aurais voulu la détester, mais je ne pouvais pas. Personne ne pouvait la détester. Du moins, c'était quasiment impossible. Mes parents étaient complètement absorbés par ma soeur et son stupide violon. Je ne voyais pas pourquoi mes parents étaient fascinés par ça. Cordélia avait passé les deux dernières semaines à répéter encore et encore. On le connaissait par coeur son récital. Ils n'arrêtaient pas de prendre des photos, à murmurer qu'elle était extraordinaire. J'avais vraiment envie de leur crier que les personnes autour de nous avaient sans doute compris que votre fille étaient un petit génie du violon. Durant tout le récital, j'avais les bras croisés, ne cessant de pousser des soupirs et à lever des yeux à chaque remarques de mes parents. Et puis vint la fin du récital. La libération. La liberté. Du moins, c'est ce que je croyais. Mes parents avaient insisté pour qu'on reste un peu après, pour parler avec le professeur de Cordélia. On était resté. Mes parents parlaient avec ce professeur avec une Cordélia toute souriante lorsqu'on lui parla du Conservatoire. Son rêve. Enfin surtout celui de mes parents, mais ils avaient tellement ancré cette idée dans sa petite tête blonde - enfin brune - que c'était devenu son rêve à elle aussi. Puis vint une question tout innocente.
« Et Hermione n'a jamais voulu faire de la musique ? » Mes parents s'étaient regardés durant quelques secondes avant d'avoir un petit rire. Comme si ça signifiait : oh non elle n'est pas assez bien pour faire ce genre d'activité.
« La musique n'est pas vraiment son domaine. Elle préfère le sport. D'ailleurs elle est dans l'équipe de basket de son école et ils sont favoris pour devenir champion. Et ça grâce à elle ! » Un immense sourire se trouva sur le visage de Cordélia. Voilà pourquoi on ne pouvait pas la détester. On avait beau lui dire qu'elle était parfaite, extraordinaire et d'autres compliments dans ce genre, elle refusait de les écouter et préférait mettre les autres en valeur. Enfin malgré cette petite remarque bien sympathique de ma soeur, mes parents s'étaient remis à parler de la parfaite Cordélia. Irrécupérable.
Je l'avais fait. Major de ma promo au lycée. J'allais faire le discours lors de la cérémonie de remise de diplôme. Même Cordélia n'avait pas réussi à faire ça ! Ils n'avaient plus intérêt à me dire que je n'étais bonne à rien. Bordel, major de la promo c'est quand même cool ! Quand le proviseur m'avait convoqué dans son bureau, je pensais que c'était à cause de cette petite dispute - légèrement violente - avec cette fille qui m'avait accusé d'avoir volé son petit copain. Je n'avais rien fait du tout. Et puis c'était lui qui avait fourré sa langue dans ma bouche. Enfin bref, quand il m'a annoncé que j'étais celle qui allait faire le discours, mon coeur s'est arrêté de battre avant de pousser un cri de joie immense. Il avait certainement dû me prendre pour une folle et regretter son choix. Il ne s'imaginait pas ce que cela pouvait signifier pour moi. Et à la fin de la journée, c'était en courant que j'étais rentrée chez moi, de bonne humeur. Peut-être que j'aurais le droit à des félicitations. Ce qui je dois l'avouer est mon but ultime concernant mes attentes au niveau de mes parents. Juste un petit félicitation ou un bravo.
« Je suis rentrée ! Et avec une bonne nouvelle en plus ! » Pas de réaction. Pas de réponse. A part des rires. Je refermais la porte avant de me diriger vers l'endroit d'où provenait les bruits, c'est-à-dire le salon. Le sourire que j'avais sur le visage s'effaça doucement lorsque je vis ma soeur et son copain au salon. Cordélia avait la main tendue, montrant fièrement la bague qu'elle abordait à son doigt. Son copain était devenu son fiancé. Et à partir de ce moment-là que j'ai su que je pouvais dire n'importe quelle nouvelle qui soit, elle allait passer inaperçu. Cordélia allait se marier. N'est-ce pas magnifique ?
« Wahou félicitation ! Cette bague est magnifique ! » Voici les seuls mots que j'avais prononcés. Oh j'aurais pu annoncer la nouvelle, mais de toute façon c'était mort, ils ne m'écouteraient pas de toute manière. Alors durant le reste de la soirée, je passais mon temps à féliciter les deux futurs mariés.
Qu'est-ce qui s'est passé dans la tête de ma soeur le jour où elle a fixé la date de son mariage. Je me le suis toujours demandé. Généralement, les mariages ça se fait quand il fait beau, quand il fait chaud (bon d'accord en Alaska, c'est compliqué, mais on attend quand même les beaux jours) ! Mais là non ! Un mariage blanc ! Un mariage en plein mois de Décembre ! Sous la neige ! Sous le froid ! Et comme ça si cela ne suffisait pas la cérémonie ne s'était pas passé à l'intérieur d'une église, mais à l'extérieur ! Je crois qu'à ce moment-là, je n'étais pas la seule à maudire ma soeur et son idée complètement stupide. Enfin heureusement qu'il y avait un peu de soleil. Ca nous réchauffait un peu, mais vraiment un peu. A part ça, la cérémonie était magnifique. Ma mère en a pleuré à faire couler son maquillage. Bon d'accord, j'ai aussi versé ma larme. C'est aussi à ce jour-là que je l'ai rencontré. Ce n'était que le témoin du marié, son meilleur ami. Une personne que j'allais voir une ou deux fois l'année peut-être. Ce n'était pas quelqu'un de si important pour moi. Et pourtant je me souviendrais toujours de notre première rencontre - du moins, la première avec une vrai conversation. J'étais à l'extérieur, essayant de téléphoner à mon petit ami qui devait être sur le chemin et c'est à ce moment-là qu'un boule de neige s'était malencontreusement retrouvé projeté contre mon dos.
« Putain, si j'attrape le mioche qui a fait ça, il va se retrouver la tête la première dans la poudreuse ! » Candy dans toute sa splendeur. Jurant devant des enfants. Oh et puis après tout, ce n'est pas comme si leur bouche innocente allait le rester longtemps. Je m'étais retournée, prêt à courir pour attraper cet enfant, sauf qu'il y en avait pas. Ce n'était pas un enfant, mais un adulte. Le témoin. Jeremiah. Et il avait un grand sourire cet idiot !
« C'est que tu trouves ça drôle en plus ! T'es vraiment con ! » Il s'était mis à rire, s'approchant de moi alors que je tentais d'enlever la neige qu'il y avait dans mon dos. Il commençait à m'aider. Mon coeur commençait à battre de plus en plus vite, mes joues devaient certainement devenir un peu plus rouge. Un léger frisson avait parcouru tout mon corps lorsque je sentais ses doigts sur ma nuque. D'accord, la situation devenait bizarre. Et elle le devenait encore plus lorsqu'il s'était mis à m'embrasser. J'avais ouvert les yeux en grand avant de lui mettre la plus grande baffe qu'il est connu avant de me reculer.
« Non mais qu'est-ce qui s'est passé dans ta tête ? T'es vraiment taré ! » Il avait un sourire en coin.
« Bah quoi. Le témoin qui fini avec la demoiselle d'honneur, c'est presque comme une tradition. » J'ouvrais la bouche en grand. Ce type était un idiot.
« Pas quand la demoiselle d'honneur a un copain ! » Ce fut à son tour d'avoir l'air surpris. Je commençais à me diriger vers la salle. Et sur le chemin, je m'étais baissé pour faire une boule de neige pour ensuite la lui lancer. Une sorte de vengeance. Certes c'était débile, mais ça restait une vengeance quand même. Ce type était vraiment un imbécile. J'espérais que je n'allais plus le croiser par la suite.
« Jorah descend de la table ! » Et le chat descendit de la table. C'était magnifique, comme s'il m'avait compris. Dès fois, je me demandais comment les animaux pouvaient nous comprendre. Il ne devait certainement pas capter le moindre mot qu'on racontais. Je m'installais dans le canapé à côté de mon petit ami. Plus d'un an de relation. Cela se fêtait. Surtout que c'était sûrement l'une de mes plus longues - et surtout sérieuses.
« Bon quel est le programme de la soirée ? » me demanda-t-il avant de m'embrasser rapidement.
« Eh bien, j'ai pensé qu'on pouvait commencer la soirée par une partie de jeu vidéo à laquelle je te battrais à plat de couture. » Il s'était mis à rire avant de m'embrasser à nouveau. « Oh mais ne t'inquiète pas, je ferais tout par la suite pour que tu oublies cette terrible défaite. » dis-je avec un grand sourire. Tout était parfait. Qu'est-ce que je pouvais demander de mieux. Ah si, qu'on ne soit pas interrompu par ce stupide téléphone. Et pourtant c'était ce qui s'était passé. J'avais attendu quelques sonneries. Peut-être que c'était quelqu'un qui avait fait un mauvais numéro. Et pourtant j'avais décroché à ce foutu téléphone.
« Oui, allo ? » « Hermione Oswald ?» Le sourire que j'avais quelques secondes auparavant avait disparu. Je m'étais levée, faisait signe à mon petit ami de se taire. Les rare fois où on m'appelait par mon premier prénom était souvent mauvais signe.
« C'est moi. » Je retenais presque ma respiration, attendant à ce qu'on m'annonce le pire.
« Je suis désolée. Votre soeur. Elle a eu un accident. Elle et son mari n'ont pas survécu. » Les larmes coulèrent toute seule. Non c'était une blague. Une blague de mauvais goût. Cordélia ne pouvait pas être morte. Elle n'avait pas le droit. Elle ne pouvait pas me laisser seule. La personne qui me parlait au téléphoner continuait de dire quelque chose, mais je ne l'écoutais plus. Mes larmes coulaient toutes seules. J'étais en train de dormir. Oui, c'est ça je dormais et étais en train de faire un affreux cauchemar. Je voulais juste me réveiller de ce cauchemar. Demain matin, lorsque je me réveillerais Cordélia sera là et me racontera la dernière anecdote sur Teddy, comme quoi il aurait presque dit son premier mot et pour ne pas la contredire je lui dirais que c'est fabuleux - même si pour un nourrisson de deux mois, c'est strictement impossible. Oui, demain quand je me réveillerais, elle ne serait pas morte.
Moi et les enfants, ça fait dix millions. Dès que je prends un bébé dans les bras, il se met à pleurer. C'est ce qui s'est passé avec Teddy d'ailleurs la première fois que je l'ai pris dans mes bras. Il s'est mis à pleurer comme pas possible. Ouais, je ne suis définitivement pas doué avec les enfants. Et pourtant, j'allais devoir changer ça. Cordélia m'a nommé tutrice de son gamin s'il lui arrivait quelque chose. Elle ne devait certainement pas avoir peur. Ou alors peut-être qu'elle pensait que j'allais m'améliorer avec le temps. Et puis elle n'avait certainement pas pensé à mourir aussi jeune. Bordel, ils n'avaient que vingt-cinq ans et avait un enfant de deux mois, ce n'était pas un âge pour mourir ! Et je n'avais pas l'âge pour m'occuper d'un bébé. J'étais beaucoup trop jeune. Beaucoup trop irresponsable. Je regardais Teddy. Le pauvre, il avait l'air d'être aussi perdu que moi.
« C'est donc là que vous vous cachez. » Je levais la tête avant de la baisser à nouveau.
« C'était beau le petit spectacle que tu as donné tout à l'heure. » Je soupirais. Dire les quatre vérités à mes parents lors des funérailles de ma sœur était de loin la pire idée que j'avais eu de ma vie. Mais fallait que ça sorte. Ils n'arrêtaient pas de me dire que je n'allais pas pouvoir m'occuper de Teddy, que de toute façon ils allaient tout faire pour avoir sa garde. Ca m'avait énervé et j'avais explosé. Et je m'étais réfugiée avec le petit dans un coin calme. Vu ma réaction, peut-être qu'ils avaient raison.
« C'est tout ce que tu me veux Jeremiah ? » dis-je dans un soupir. Il s'était assis à côté de moi. Je ne le regardais pas.
« Ils ont tort. Tu seras super pour le petit. Si ta soeur t'a choisi, c'est parce qu'elle avait confiance en toi. » J'avais ri. Sûrement le premier rire depuis l'annonce de la mort de Cordélia. Moi être super pour un enfant, c'était la blague de l'année. Je ne pouvais pas le faire. Un de ses mains se posa sur mon menton et me fit relever la tête.
« Et si tu as besoin d'aide, tu peux m'appeler. » Son visage s'était approché du mien. Nos lèvres n'étaient qu'à quelques millimètres.
« C'est quoi ce coup-ci ? Le mythe du parrain et la marraine ? » Il ne répondit rien, s'éloignant même. Il avait un sourire en coin. Le seul baiser qu'il déposa avant de partir n'était pas sur mes lèvres, mais sur mon front. Et dire que dans tout ce bazar, ce stupide témoin était le seul qui croyait en moi.